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Alain Delon et Claude Brasseur
Claude Brasseur et Mireille Darc
BRAVO M. Lautner, votre omelette norvégienne est savoureuse ; chaud-froid d'angoisse et d'humour saupoudré de suspense et de mélo, vous avez eu la main heureuse pour la réussir ! Il y a longtemps que l'on attendait dans un registre majeur le papa des « Tontons flingueurs ». Vous n'avez pas déçu : votre nouveau film « fonctionne » parfaitement. On y croit, on tremble, on craint, on frémit, on doute et je ne suis pas sûre du tout que Me Alfred — le célèbre Hitchcock lui-même — aurait fait mieux que vous en l'occurrence.
Une horlogerie bien réglée
Les invraisemblances, il
y en a, on ne s'en soucie
qu'après s'être laissé berner, entourlouper, ensorceler par vos finasseries,
votre horlogerie si bien
réglée qu'au top il est
toujours Brasseur juste.
Car vous avez eu un
atout maître dans votre
film, il s'appelle Claude
Brasseur. Drôle, tendre,
prodigieux de naturel et
de vérité ; nous en reparlerons.
Peut-être convient-il
tout de même d'éclairer
un peu (rassurez-vous :
pas question de tout
dévoiler) le futur spectateur sur l'étrange énigme
des « Seins de glace »,
tirée du roman de Richard
Matheson.
Un nœud de mystères
C'est l'histoire d'un
auteur de feuilletons TV
(Claude Brasseur) réfugié en plein hiver à
Antibes pour tirer à la
ligne une série à épisodes
et à dormir debout.
Entre deux paragraphes, il se balade sur
la plage et croit y rencontrer sa propre héroïne
(Mireille Darc). Amusé, il
essaie de la « draguer »,
mais elle demeure inattaquable. Fasciné, curieux,
déjà presque amoureux, il
la poursuit et découvre
un nœud de mystères.
Quelles drôles de gens
entourent cette étrange
blonde ? Quel jeu joue-t-elle? La séquestre-t-on ?
Et quel est donc le rôle
de ce jeune et puissant
avocat (Alain Delon) toujours avisé des moindres
faits et gestes de Peggy ?
Un ange ou un monstre ?
Tout cela parait un peu mélo à notre feuilletoniste, qui en a écrit d'autres. Il s'efforce de rire de la situation, cela lui vaut d'être bloqué dans un ascenseur, assommé au troisième sous-sol d'un parking, boxé dans sa propre chambre et finalement estourbi par la révélation du personnage de Peggy. Ange ou monstre ? Je ne vous le dirai pas. Vous le découvrirez avec lui, il vous communiquera ses doutes et ses espoirs, votre cœur bondira au rythme du sien et du fil aiguisé d'une panoplie de coutellerie que Georges Lautner a mise en scène avec autant de soin que ses acteurs.Mireille Darc, vacille avec émotion et talent dans un rôle très lourd d'héroïne de série noire où l'on n'imaginait pas, a priori, cette grande blonde. Alain Delon ajoute à son habituelle élégance glacée une note sensible, et Claude Brasseur met tout le monde dans sa poche, promenant son exceptionnelle chaleur humaine dans « Les Seins de glace ».
A propos de Claude Brasseur, on répète volontiers qu'il est le digne fils de son père dont il possède le riche tempérament et l'aisance désinvolte ; on oublie toujours de se souvenir qu'il est également le fils d'Odette Joyeux, dont il tient, sans doute, le cœur et la finesse. Je voulais le rappeler au moment où toutes les facettes du talent de Claude Brasseur brillent à tous les yeux.