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Article de presse en 1974
Le film de Vadim : un double scandale.
IL y a quinze ans, à sa sortie sur les écrans (en septembre 1959), le film « Les Liaisons dangereuses » provoqua un double scandale dont la Justice eut à débattre. Non sans peine : le Conseil d'Etat mit trois ans avant de rendre son arrêt sur l'un d'eux ; et la Cour de cassation, six, pour statuer sur l'autre. Le premier conflit, concernant l'éthique du cinéma, avait été suscité par la Société des Gens de Lettres. Estimant abusif l'emploi du titre du roman de Laclos pour un film qui « trahissait l'esprit de celui-ci », les Gens de Lettres avait obtenu la saisie, le jour même de sa sortie. Saisie éphémère d'ailleurs, mais qui incita les auteurs du film à ajouter à son titre ce « 1960 » qui y est resté depuis. En 1966, néanmoins, la Cour de cassation estima infondée l'action des Gens de Lettres... Le deuxième conflit, d'ordre purement moral, lui, avait opposé les distributeurs du film à dix municipalités de province qui avaient, soit interdit sa projection, soit limité celle-ci aux « plus de vingt ans ». Il s'agissait des villes de Rouen, Mulhouse, Beauvais, Senlis, Avranches, Marseille, Landerneau, Saverne, Le Mans, Dijon. Après trois années de procédure, le Conseil d'Etat, dans un arrêt nuancé, devait estimer l'interdiction fondée pour les huit premières de ces villes, en raison de « circonstances locales particulières » rendant, chez elles, la projection de ce « film à caractère immoral » dangereux pour l'ordre public. De multiples protestations émanant des milieux les plus divers, avaient justifié ces « circonstances particulières ». Dans les deux dernières villes, en revanche, les mesures prises par les maires avaient été estimées illégales. Quinze ans après, ces conflits paraissent aussi surannés que le licenciement de Noëlle Noblecourt de la TV pour avoir laissé voir ses genoux. Et Vadim tourne une sage « Histoire de Saint-Germain-des-Prés », qui sera un peu le testament de l'O.R.T.F. puisque nous la verrons à la fin de l'année.