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Les tribulations d'un chinois en chine
Interview de Philippe de Broca à l'occasion de la première diffusion à la télévision française du film "Les tribulations d'un chinois en Chine" , le lundi 20 décembre 1971 à 21h35 sur la 1ère chaine. Et celà à l'occasion d'une série de 6 émissions : "Festival Cinématographique de l'aventure".
Philippe de Broca : "Les tribulations", c'est un vaudeville du XIXé siecle.
EN veste de mouton retourné, le teint rose de quelqu'un qui vient de faire une promenade au grand air, Philippe de Broca revient à son hôtel où il va déjeuner avec toute l'équipe de « Louise », le film qu'il va tourner actuellement près du lac d'Annecy. Il a trente-huit ans et, déjà, à son crédit, douze films, dont « Le Farceur »,« L Amant de cinq jours », « Un monsieur de compa gnie » et « Les Tribulations d'un Chinois en Chine » que vous offre, ce soir, la télévision. « Je ne crois pas que je le regardai, dit de Broca. Je l'avais conçu en fonction de la couleur. Je trouve monstrueux qu'on le passe sur la 1ère chaîne quand il en existe une autre en couleur... D'ailleurs, il me semble également stupide de choisir des films noir et blanc sur cette 2ème chaîne. C'est avec son « complice » habituel, Daniel Boulanger, que Philippe de Broca a adapté le livre de Jules Verne dont, d'ailleurs, ils ne gardèrent pratiquement que le titre.
Aventures pour adultes
Je venais, dit-il, de tourner « L'Homme de Rio », qu'on avait écrit pour les enfants, comme un exercice de récréation. Après le succès qu'il a eu et, franchement, je ne m'y attendais pas, je me suis dit : « Tiens, cette fois, je vais faire un film d'aventures pour adultes, il y aura tout : de l'exotisme, des aventures dans des pays lointains, un héros, une belle fille... C'est un film que je voulais complètement comique. Il y a deux ou trois séquences que j'aime beaucoup, mais je crois qu'elles ne passeront pas bien à la TV. Avant « Les Tribulations », Philippe de Broca a parcouru près de 100 000 kilomètres. Deux fois, il est allé reconnaître les lieux avec ses techniciens, utilisant Land-Rover, hélicoptère et jonques. Il a tourné au Népal et à New-Delhi , à Hong-kong et en Malaisie dans l'île Lankawi. Le film a coûté plus d'un milliard d'anciens francs. « Les Tribulations ». dit- il, on les voyait, Boulanger et moi, un peu comme un grand cirque à sept pistes. Il y a Jules Verne, bien sûr, mais on s'en est beaucoup éloigné. Jules Verne, c'est vraiment la fée électricité. On l'a modernisé. « Les Tribulations ». c'est un rêve burlesque. Je ne trouvais pas « L'Homme de Rio » tout à fait réussi, je voulais faire mieux. En fait, c'est le premier qui a le mieux marché. A l'époque, j'ai expliqué que j'avais essayé de retrouver un ton, celui du vaudeville fin XIXe. C'est la raison pour laquelle je n'ai surtout pas voulu tourner en costumes d'époque. Mon propos n'était pas de réaliser une reconstitution historique.
Une véritable rupture
Aujourd'hui, en pensant à ce film, tellement aux antipodes de ce que je fais en ce moment, j'ai soudain envie d'en refaire un autre du même style. Dans ma carrière, il marqua une véritable rupture : tout de suite après, j'ai fait « Le Roi de cœur », qui est très différent, mais que j'aime plus encore. Il arrive un moment où l'on s'aperçoit que, par rapport à soi-même, on a épuisé les possibilités d'un genre. C'est ce qui m'est arrivé avec « Les Tribulations ». Aujourd'hui, j'aborde un genre tout à fait nouveau pour moi ; « Louise », que joue Jeanne Moreau, sera mon premier film « lent », mais « lent » ça peut évoquer l'ennui, je préfère dire « andante ». J'ai déjà fait des films graves, mais « allegro ». Celui-là est grave, mais « en andante ».
Belmondo et Ursula Andress :pendant le film, leur première rencontre
J'AI fait trois films en quatre ans avec Belmondo, raconte de Broca : «Cartouche », « L'Homme de Rio », « Les Tribulations d'un Chinois en Chine », et, chaque fois, nous retrouvions une certaine entente qui faisait que, professionnellement, on ne s'adressait jamais la parole. Jean-Paul, je lui donne le départ et l'arrivée. C'est tout. Si je refais un film avec lui, ce sera très différent : des années ont passées. Cela suffit pour que les choses et les gens ne soient plus tout à fait les mêmes. Jean- Paul et mol avons travaillé comme des enfants gâtés, des saltimbanques milliardaires. Sur les tournages, on faisait des farces, comme d'entrer dans des chambres d'hôtel déguisés en femmes de ménage. Bref, tout ce côté qu'on retrouve dans « Les Tribulations ». Nous avons exactement le même âge, à quinze jours près, je suis né un 15 mars, lui en avril. Nous avions vingt-huit ans au moment de « Cartouche ». On faisait un film cher : cinq cents millions. J'étais le metteur en scène. Il était l'acteur. Il n'empêche qu'on était encore deux gamins. Jean-Paul Belmondo et Ursula Andress se sont rencontrés en tournant « Les Tribulations ». « Au début, raconte de Broca, ils ne s'adressaient pas la parole ; ensuite... j'ai rarement vu une passion éclater aussi vite. Je connaissais déjà Ursula. Elle est meilleure comédienne qu'elle le croit, mais elle n'a pas confiance en elle. Leur entente et leur amour n'ont en rien dérangé le tournage du film : au contraire, on travaille toujours mieux avec les gens qu'on aime. Je souhaiterais tourner un nouveau film avec eux. J'ai, dans mes tiroirs, un scénario presque terminé. »