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Anita Berglund et Helene Maguin
Annie Belle et Jean Loup Philippe
Catherine et Marie Pierre Castel
Claudine Beccarie et Martine Grimaud
Jean Loup Philippe et Annie Belle
Jean Loup Philippe et Martine Grimaud
Suce moi vampire Helene Maguin
Jean-Loup Philippe Frédéric Annie Belle Jennifer Natalie Perrey la mère de Frédéric Martine Grimaud la photographe Serge Rollin Frédéric enfant Catherine Castel une vampire Marie-Pierre Castel une vampire Hélène Maguin une vampire Anita Berglund une vampire Paul Bisciglia le psychiatre Willy Braque le tueur Claudine Beccarie Claudine Béatrice Harnois le modèle Sylvia Bourdon la fausse Jennifer Jean Rollin le gardien du cimetière Mireille Dargent Julien Etchevery
Réalisation : Jean Rollin
Scénario : Jean Rollin
Adaptation : Jean Rollin, Jean-Loup Philippe
Dialogues : Jean-Loup Philippe
Images : Jean-François Robin
Assistant opérateur : Gilles Pollet
Son : Gérard Tilly
Bruitages : Henry Humbert
Musique : Didier William Le Pauw
Montage : Olivier Grégoire
Maquillage : Eric Pierre
Décors : Alain Pitrel
Script : Natalie Perrey
Chef électricien : Jean de Vits
Electriciens : Louis Couce, Jean-Pierre Merci
Photographes de plateau : Maxime Wong, Pierre Gautard
Production : Jean-Marc Ghanassia - Off Productions / Olivier Nouaille - Scorpion 5 / Lionel Wallman - Nordia Films
Distribution : Les Films de l'Obélisque
Sortie le 19 mai 1975
Alors qu’il participe à une soirée mondaine, Frédéric est frappé par la vision d’un château en ruine sur une affiche publicitaire. Des images, dont il ne saurait dire si elles sont de simples fruits de son imagination ou des souvenirs d’enfance, reviennent à son esprit. Il se voit enfant, égaré dans la nuit et recueilli dans ce château par une jeune fille très belle et très mystérieuse. Sa mère ne semblant guère disposée à répondre à ses interrogations, Frédéric se lance à corps perdu à la recherche de son passé et de la belle inconnue...
CRITIQUE(S) :
« De tous mes films, je trouve que c’est la meilleure histoire. Le meilleur scénario. Le film est un peu abracadabrant. Il est quelquefois un peu bâclé, parce que, du fait que nous avions une semaine de moins que prévu, on devait changer de décors pratiquement tous les jours. Je trouve que c’est une jolie histoire, une des plus intéressante que j’ai eue entre les mains. » - Jean Rollin, entretient avec Marc Georges pour Monster Bis n°20, 1981
« Outre une contribution très personnelle au cinéma fantastique français, LEVRES DE SANG constitue un nouvel approfondissement thématique de l’œuvre de Jean Rollin, une nouvelle variation sur les thèmes déjà abordés dans les précédents longs métrages de ce réalisateur. Dans une lignée spirituelle où se retrouvent les influences d’Hoffmann, d’Alain-Fournier et de Gaston Leroux, Jean Rollin revient, avec une exemplaire fidélité à lui-même, sur la thématique romantique qui le hante : quête éperdue de la Femme aimée, prédestination à une vie meilleure, révolte individuelle contre les mutilations d’une société répressive, lutte obscure dont le héros est l’enjeu entre les bienfaisantes forces de la nuit et les puissances diurnes destructrices, inflexion du mythe vampirique dans un sens anarchisant du triomphe de l’amour (c’est-à-dire de la pureté dans la mort). Et avec pour seul atout cette exceptionnelle constance thématique, Rollin, contre vents et marées, donne une œuvre poétique intense qui a même su conquérir les allergiques et les récalcitrants.
Si, à une première projection, le sens critique est émoussé, tant on est « sous le charme », une deuxième ou une troisième vision de LEVRES DE SANG font mieux prendre conscience du « miracle Rollin ». Voici un film, rapidement tourné, qui souffre d’un budget médiocre, d’une interprétation déplorable, d’un dialogue extrêmement faible, d’une mise en scène raide et maladroite. Et ce film fascine, étonne, ravit, parce que la personnalité de l’auteur s’exprime au-delà de la technique, presque malgré la technique.
Il est significatif de constater que la mise en scène de Rollin dans les lieux clos (soirée mondaine, scène chez la mère) est totalement inconsistante, alors qu’elle s’épanouit sitôt que l’imagination du poète est projetée dans les vastes espaces du décors naturel (rues de Belleville, fontaines du Trocadéro, château de Sauveterre, plage de Dieppe). Le réalisateur témoigne en quelque sorte d’une indifférence totale à « faire de la mise en scène » et préfère laisser errer son regard, au fil de la rêverie ou de l’improvisation, en de longues séquences aux couleurs très froides et plastiquement très achevées, sur l’insolite du cadre quotidien. Démarche expressionniste caractérisée, prééminence du minéral sur l’humain, approche poétique dédramatisée, essentiellement contemplative, du décors souverain.
Cette conception très formaliste du fantastique est prétexte à ces « idées de mise en scène » dont foisonnent les films de Rollin : rencontre de l’enfant et de jeune vampire, éveil des chauves-souris dans les cercueils, apparition de Jennifer dans une salle de cinéma jadis bien connue des amateurs de films de d’épouvante, déambulations des femmes vampires dans le cimetière Montmartre, internement de Frédéric dans une chambre aux murs livides où il a un crapaud pour unique compagnon, incinération des vampires, concert des mouettes et de la mer, montée de la marée qui entraîne au large le cercueil des amants…Autant d’idées originales et ravissantes qui risquaient, comme dans LES DEMONIAQUES, de nuire à l’unité du film en donnant l’impression d’un « bout à bout ». LEVRES DE SANG contourne ce danger grâce a un scénario plus rigoureux qu’à l’accoutumée et dont la cohérence pourrait autoriser maintes interprétations freudiennes si la séquence de l’hôpital psychiatrique ne dénonçait, a priori, ce genre d’analyse.
Car l’univers de Rollin est celui de l’intuition, de la perception affective, au-là de toute intellectualité. L’itinéraire onirique de ce grand Meaulnes à la recherche de sa Belle au bois dormant est d’abord une récession, l’engloutissement dans le décors représenté par la photo, le retour à l’enfance, le triomphe d’un imaginaire plus vécu que la réalité (« Je me suis toujours senti étranger à cette enfance racontée par vous »). Au-delà de l’anecdote, somme toute conventionnelle, LEVRES DE SANG est la peinture d’un état de sensibilité, très proche de ce que les romantiques allemands avaient baptisé la « fantaisie ». C’est l’approche du mystère des êtres et des choses, au-delà des apparences, dans leur réalité sensible. C’est un univers nocturne, mais travaillé au pastel. Car si la nuit chez Rollin est certes enveloppante et énigmatique, elle est aussi lumineuse et féerique car l’illuminent l’enthousiasme de la jeunesse, la nostalgie de l’enfance perdue, la fraîcheur du rêve où vibre l’élan d’amour et de générosité.
LEVRES DE SANG est, avec LA VAMPIRE NUE et LA ROSE DE FER, le film le plus profond et le mieux maîtrisé d’un dilettante très doué. » - Jean-Marie Sabatier, La Saison cinématographique 1975
« Formellement, c’est l’un des meilleurs Rollin. Le cinéaste n’a sans doute jamais aussi formidablement traduit à l’écran ses visions, héritées des surréalistes et de Cocteau. On citera pour mémoire (...) une fantomatique virée nocturne, et une séquence quasi anthologique au cours de laquelle Rollin abandonne son itinéraire habituel et peu passionnant (cimetière-horloge-bord de mer) pour réinventer un Paris encore plus improbable et inquiétant que celui dans lequel Jean Marais traquait la Princesse/Maria Casarès. Qualités dont l’évidence force le respect, mais contrebalancées, comme presque toujours chez le cinéaste, par le caractère parfaitement rapporté des dialogues et l’interprétation approximative. (…) LEVRES DE SANG (…) montre à quel point Rollin peut osciller entre paresse et fulgurances géniales. » - Armel de Lorme, Dictionnaire des films français pornographiques et érotiques 16 et 35 mm, Serious Publishing, 2011
NOTE(S) :
Une partie du matériel du film devait servir, avec l’ajout de séquences « hard », à monter un film bien différent, intitulé SUCE MOI VAMPIRE (sorti le 7 juillet 1976) Un double tournage dont Jean Rollin donne sa version dans son autobiographie : « Inutile de dire que LEVRES DE SANG ne connut aucun succès et demeura, avec LA ROSE FER, mon plus gros échec. Le pauvre Jean-Marc était pratiquement sur le sable. Aussi, par reconnaissance pour la confiance qu’il m’avait témoignée, je pris des doubles de certaines scènes, les complétais par deux longues séquences X, et bricolais un film sous le titre SUCE-MOI VAMPIRE. C’était le tout début du X, et le film fit recette. Le label faisait passer n’importe quoi, c’était le nouveau truc à la mode. Les spécialisées dans la série B se transformèrent en salles X. C’était la fin des vampires rollinesques… » - Jean Rollin, MoteurCoupez ! - Mémoires d’un cinéaste singulier, Éditions Édite, 2008
Fiche réalisée par stéphane Bruyère pour BDFF, 2016