Si les fiches que je réalise pour BDFF pèchent parfois par leur non-exhaustivité côté distribution, c'est que je n’ai pu réunir le nom de tous les acteurs, faute de preuves. En effet, la passion du cinéma qui m’anime ne m’assure pas toujours les moyens d’investigations suffisants, aussi certaines fiches pourront-elles sembler bien incomplètes aux cinéphiles qui les consulteront. Elles ont cependant le mérite de se baser sur des éléments dûment vérifiés.
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Bernadette Lafont Marie Jean-Pierre Léaud Alexandre Françoise Lebrun Veronika Isabelle Weingarten Gilberte Jacques Renard Alexandre's Friend Jean-Noël Picq Offenbach's Fan Jean-Claude Biette Café Les Deux Magots' Customer (non crédité) Pierre Cottrell (non crédité) Jessa Darrieux (non crédité) Jean Douchet Café de Flore's Customer (non crédité) Douchka (non crédité) Bernard Eisenschitz Café de Flore's Customer (non crédité) Jean Eustache Man in Sunglasses in Store (non crédité) Berthe Granval (non crédité) Caroline Loeb (non crédité) Marinka Matuszewski (non crédité) Geneviève Mnich (non crédité) Noël Simsolo Café de Flore's Customer (non crédité) André Téchiné Café Les Deux Magots' Customer (non crédité)
Alexandre, jeune oisif, traine les terrasses des cafés de Saint-Germaindes-Prés, avant de rentrer le soir auprès de Marie, plus âgée que lui. Il lui ramène un soir Veronika, un peu paumée et la vie à trois s'organise, en en toute liberté. Veronika, amoureuse et enceinte d'Alexandre, décide de garder le bébé qu'elle attend...
CRITIQUE
DU calme et du courage, il n'en faut pas moins pour dire tranquillement mais fermement que le film de Jean Eustache, qui représente la France au festival de Cannes. "La Maman et la putain ". est un monument d'ennui et un Himalaya de prétention. Ne pas se laisser aller à l'Indignation : après tout, trois heures et demie d'ennui au cinéma, cela c'est déjà vu , à ce point pesant, tout de même très rare. Le sujet est d'un Intérêt limité un freluquet désœuvré (Jean Pierre Léaud) entretenu par une maitresse vaguement maternelle (Bernadette Lafont) lève au Flore une Infirmière anesthésiste (Françoise Lebrun), stakhanoviste du < baisage > tous azimuths. Rendez-vous, bistrots, bavardages sur moleskine, coups de téléphone désordonnés, fuites, retours, chasses-croisés et tentative triangulaire avant la découverte de l'Amour à majuscule, dans les larmes, la saoulographie et les draps sales.
Un univers tout en gris
Que reprochalt-on à Henry Bernstein. déjà ? L'adultère bourgeois, les téléphones blancs et les draps de soie. Ici des petits-bourgeois, qui se veulent libres. s'efforcent d'effaroucher le bourgeois ; le téléphone est gris comme les draps. On boit le pastis et le whisky au goulot, à cela près on se dit "vous" , l'intimité dépasse toutes les normes connues mais il y a tout de même des limites... Je ne plaisante pas ; hélas, le réalisateur non plus ! S'il a le sens de l'humour, il le cache bien. Gérard Lenne, qui admire le film au point de l'avoir vu déjà deux fois (je lui avais promis de le dire, c'est fait!), m'assure que Jean Eustache est un homme timide, discret, effacé, dont les maîtres sont Bresson. Resnali et Rohmer. Que ne s'est-il contenté de les admirer ! Il n'est telle sorte de timide pour tenir des propos fracassants : " Je ne crois qu'en la provocation". dit-il volontiers, et aussi : "Il faut savoir déplaire." On peut au moins le rassurer sur ce point : il sait déplaire. Dans ce domaine, la réussite est incontestable, mais il est tout de même assez outrecuidant pour un cinéaste de penser retenir l'intérêt du public en lui présentant un ouvrage qui relève encore du laboratoire, si toutefois iI en sort un Jour. Certes Jean Eustache connaît le cinéma sur le bout des doigts. Il ne cesse de faire allusion, dans son film, à des gestes, des répliques d'autres films. Lui, Il fait du cinéma-refus ; noir et blanc ; sans aucune recherche de mise en scène avec d'interminables plans fixes. Lorsque les personnages s'installent pour écouter un 78 tours, il y en a pour trois minutes d'immobilité absolue, seul le disque tourne. Si l'on aime Fréhel, Dalida ou Piaf, on peut les écouter chez soi plus confortablement. Je sais bien en quel désaveu les Trissotins de la pellicule tiennent, ces temps-ci. le cinéma-spectacle et divertissement. Je connais leur terrorisme verbal qui est le dernier snobisme. A Paris, j'ai même lu quelque part, l'autre jour. « Poquelin 00 00 ne répond plus » Pauvre Molière, on l'avait encore enterré à la sauvette, sans nous le dire. Il s'en remettra, i1 a l'habitude. Je crains que Jean Eustache ne se remette moins vite de l'exercice d'hypnose qu'il nous inflige avec "La Maman et la putain ". La grande clé du film serait là : dans le facteur temps, la durée est ce qui voudrait être, sans doute, une fascination. Pourquoi faudrait-il s'intéresser à ces larves ? Evidemment c'est tout à fait "mode" la larve et le paumé, dans le tout petit monde de notre cinéma quotidien où l'on prétend se rapprocher de la vie du vrai peuple ; sans les avoir Jamais approchés.
Trois heures quarante d'ennui
Et si le vrai peuple, le vrai public, n'était pas composé que de masochistes cherchant à tout prix à s'ennuyer pendant trois heures quarante en compagnie d'anti-héros (dont l'anti-acteur J.-P. Léaud pour faire bonne mesure) ? Et si le vrai peuple était pudique ? Et s'il n'appréciait pas, le vrai peuple, ce dialogue "intelligentsia" dont les deux perles, « super-merdique » et le verbe baiser conjugué à tous les temps, forme active et passive, reviennent inusablement comme sur un disque rayé ? Et si Jean Eustache avait expérimenté là une recette pour vider les salles malgré la présence toujours vaillante de Bernadette Lafont et la révélation d'une nouvelle venue qui n'est pas n'importe qui, Françoise Lebrun ? Ses larmes et son sourire ont bien du talent, à Mlle Lebrun, quand Jean Eustache lui permet de se taire.
Jacqueline Michel