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Gerard Lartigau et Beatrice Boffety
Michel Piccoli Gabrielle Doulcet
Romy Schneider (Hélène Haltig) Michel Piccoli (Pierre Bérard) Lea Massari (Catherine Bérard) Jean Bouise (François) Gérard Lartigau (Bertrand Bérard) Boby Lapointe (Le conducteur de la bétaillère) Hervé Sand (Le camionneur) Jacques Richard (L'infirmier) Betty Beckers (L'auto-stoppeuse) Dominique Zardi (L'auto-stoppeur) Gabrielle Doulcet (Guitte, la secrétaire de Pierre) Roger Crouzet (Le promoteur) Henri Nassiet (Le père de Pierre) Claude Confortès (Le médecin) Marie-Pierre Casey (La postière) Marcelle Arnold (La mère d'Hélène) Jean-Pierre Zola (Le père d'Hélène) Max Amyl (Le curé) Isabelle Sadoyan (L'infirmière) Henri Coutet (L'employé de la salle des ventes) Pierre Londiche (Le jeune médecin) Joëlle Robin (Une mère après l’accident) Christian Bertola (Le chirurgien) Clément Bairam (Le 1er gendarme) Jean Gras (Le chef de chantier) Jean Luisi (Le 2ème gendarme) Jerry Brouer (Bernard, le prétendant d’Hélène) Lucien Frégis (Un curieux) Michel Duplaix (Andrè, un homme après l’accident) Raphaël Delpard (L'ambulancier) Karine Jeantet (La téléphoniste) Agnès Duval (Une dame à la poste) Matt Carney (Paul, l’ami de Catherine) Gérard Streiff (Le motard) Béatrice Boffety (Anne, la camarade de Bertrand) Jean-Loup Dabadie (Un père) Lucie Blome (Une dame à la poste) Jean-Paul Blondet (Un invité)
Résumé : Pierre (Michel Piccoli), architecte d'une quarantaine d'années, est victime d'un accident de voiture. Éjecté du véhicule, mortellement blessé et dans le coma, au bord de la route, il revoit son passé et les deux femmes qui comptent dans sa vie : Catherine (Léa Massari), dont il est séparé et avec qui il a eu un fils, et Hélène (Romy Schneider), avec qui sa relation amoureuse est à un tournant.
Pendant ce temps, il revoit sa vie en accéléré et réalise alors l'importance de ces multiples petites choses de l'existence, ces joies et ces peines qui constituent le bonheur de toute une vie. L'état de Pierre constitue la trame du film : sans aucune conscience de la mort qu'il est en train de rencontrer, et naïvement obsédé par sa “fatigue”, son monologue intérieur tourne sans cesse autour de la nécessité de ne surtout pas laisser traîner une lettre qui donnerait un sens tout autre à son rapport aux autres.
Que dire ! Un des plus grands chefs d'oeuvre du cinéma français avec un Michel Piccoli dans son plus beau rôle.
A quoi tient la vie d'un homme; à un "J'ai calé" que prononce un émouvant Boby Lapointe.
Alain Bourgeois, Juillet 2021
Paul Guimard a écrit "Les Choses de la vie" parce qu'il a frôlé la mort à Casablanca
A l'instant de glisser dans la mort, le grand écrivain Valéry Larbaud articula dans un souffle : « Adieu, les choses de la vie. » Les choses. Quels souvenirs étaient donc venus affleurer sa conscience pendant sa longue et silencieuse agonie ? Et nous, à quoi songerons-nous au moment ultime ? Peut-être pas aux êtres que nous avons le plus aimés. Mais peut-être à une babiole oubliée, à un sourire ou une odeur, à un instant fugitif. A une simple chose qui donnait, mystérieusement, tout son poids et son cachet à la vie qui nous quitte.
Le portes de la nuit
Pour savoir cela, Il faut
avoir été jusqu'aux portes
de la nuit. Précisément,
Paul Guimard est ce revenant qui a pu connaître enfin le prix des choses. Et il
ne pouvait pas donner d'autre titre à son roman, devenu célèbre, que les dernières paroles du délicat auteur de « Barnabooth » :
elles allaient de soi.
J'ai eu un très grave
accident, Il y a une douzaine d'années, dit Paul Guimard. J'étais parti faire le
tour du monde à bord d'un
voilier de dix-huit mètres,
« La Constance », sur les
traces de Bougainville. Au
mouillage, à Casablanca,
après une tempête qui avait
sérieusement secoué le bateau, j'ai voulu descendre
par une échelle de coupée.
Elle s'est malencontreusement décrochée au moment
où je posais le pied sur le
premier barreau. Chute de trois mètres : ma nuque
a porté sur une marche de
fer. Vingt-quatre heures de
coma. Là, c'est du velours
puisqu'on est insensible.
Mais par la suite, j'ai bien
cru que j'allais y passer.
Il va alors vivre ce qu'il
décrira avec une précision
clinique. « L'alternative
d'espoir et de peur, le grondement sourd de l'au-delà,
les bruits flous, les pertes de
conscience et les réveils
dans le brouillard, les souvenirs de cinéma : « La Charrette fantôme », le « Rosebud » de « Citizen Kane. »
Dans ce lent voyage vers
la mort, avec ses longs arrêts inexplicables, ses démarrages soudains, ce qui
émerge toujours, ce sont
des choses lumineuses, comme « Rosebud », le traîneau
d'enfant que Kane retrouve
dans son rêve d'agonisant
après des années et des années d'oubli : finalement,
des figures étirées, où le
rêve vient se mêler au réel,
nous démontrent que la frontière entre l'imaginaire
et le vécu est bien illusoire.
Après bien des hésitations, Paul Guimard s'attelle au livre. « C'était une
autre dimension : un voyage de l'intérieur. Il me fallait faire parler un homme
incapable de bouger, inerte,
au bord d'un fossé. Tout un
livre. Je sentais bien que,
malgré mon expérience, il
me fallait la transposer.
Tout le monde ne fait pas
de bateau. J'ai pensé à l'automobile. L'accident de la
route représente aujourd'hui la mort la plus hasardeuse, la plus bête, la plus
proche de nous. »
Pendant qu'il écrit son livre, le destin lui fait, en
quelque sorte, un signe : devant lui, au cours d'une randonnée en auto, il assiste
de très près à un accident
identique à celui qu'il décrit.
« Mon héros, dit-il, un
avocat de quarante-cinq
ans, va plaider à Rennes.
Il pilote une petite voiture
rapide. Du côté du Mans,
alors qu'il roule à 140 à
l'heure, il voit une bétaillère brûler un stop. Le choc
est inévitable. » L'endroit
où se produit l'accident, Paul Gulmard le voit très
bien. C'est un lieu-dit bien
connu des Sarthois, « La
Providence ». Chaque fois
qu'il se rend en Bretagne,
Paul Guimard ralentit lorsqu'il approche des lieux. Superstitieux ? Il fait la
moue. En tous les cas, sa
description était tellement
juste qu'il reçoit plus tard
une lettre, réellement admirable, dit-il.
« Il fallait que je vous
écrive, disait le célèbre pilote Jean-Pierre Beltoise.
C'est tout à fait ça. J'ai eu
la même impression lorsqu'on m'a relevé avec cinquante fractures. »
Paul Guimard garde des
séquelles de son accident de
Casablanca. « Je ne m'en
suis jamais tout à fait remis, dit-il. J'ai des vertiges.
Je n'ai plus, à beaucoup
près, la forme physique que
je possédais auparavant.»
Six mois sur la Côte, six en Bretagne
Mais il est devenu un sage. Je vis six mois sur la Côte d'Azur et, le reste de l'année, en Bretagne, à Doélan. Et je vais vous faire une confidence : je ne connais pas la Côte d'Azur l'été. Je n'y suis jamais pendant cette période-là. Car je ne connais rien de plus beau et de plus charmant que les étés bretons. Et, cette année, il a été particulièrement réussi. C'est vous dire comme j'ai souffert : il fallait que je termine mon dernier roman, « Le Mauvais Temps. » Dans ce livre, pour la première fois, Paul Guimard « ose » parler de la mer. « C'est extrêmement difficile. Selon moi, seul Melville arrive à la saisir dans sa grandeur et sa signification métaphysique. Ce qui m'a toujours frappé, c'est qu'il n'y a que les Bretons et les Maoris qui aient chacun un mot — « Armor » et « Moana »— pour la décrire dans son étendue et sa profondeur. La plupart des écrivains ne décrivent la mer, si j'ose dire, que superficiellement. Seulement sa surface. » Breton pur sang — il est né en Loire-Atlantique — Paul Guimard a fait plusieurs fois le tour du monde sur des bateaux de tous tonnages et de toutes catégories. A telle enseigne que, évoquant les us et coutumes de la Bretagne dans « Les Cousins de la Constance », un feuilleton qui obtint le plus grand succès en 1967, il y avait des chalutiers qui retardaient leur départ pour ne pas rater un épisode. « A Concarneau, on m'a nommé citoyen d'honneur ! Et, à chaque défilé de carnaval, même actuellement, on trouve toujours un char baptisé « Les Cousins de la Constance ». On a le sentiment aigu qu'il prend la vie comme elle vient et qu'il savoure chaque instant qui passe. Mais surtout qu'il ne s'ennuie jamais. En fait, après l'expérience qu'il a traversé, il serait bien léger de passer à côté des choses de la vie."Danse de mort"... "Œuvre grave"... "Une tragédie"...
Un film tout entier comme une danse de mort , écrivait, en 1970, notre critique clnématograpique, Jacqueline Michel, à propos du film que Claude Sautet a tiré du livre « Les Choses de la vie ». « Tour à tour fait divers d'une rare précision mécanique, puis ballet au ralenti qui représente la vision interminable de la victime et, enfin, au quart de seconde, l'accident objectif : fracas d'enfer, tôles catapultées, corps gisant dans l'herbe. Pour sa part, Louis Chauvet, dans « Le Figaro », parlait de cette « évocation fascinante car on ne se borne pas à la matérialité des faits. Le narrateur en dégage la signification profonde. Nous devenons les témoins de cette tragédie jamais filmée : les derniers instants d'une âme surprise en pleine vitalité ». Quant à Jean de Baroncelli, il conclut, dans « Le Monde » : « Les Choses de la vie » aurait pu n'être qu'un film élégant et brillant. Parce qu'il a su exprimer la beauté, la fragilité et la dérision de la vie, Claude Sautet en a fait une œuvre grave qui nous atteint au plus profond de nous-mêmes. »