Si les fiches que je réalise pour BDFF pèchent parfois par leur non-exhaustivité côté distribution, c'est que je n’ai pu réunir le nom de tous les acteurs, faute de preuves. En effet, la passion du cinéma qui m’anime ne m’assure pas toujours les moyens d’investigations suffisants, aussi certaines fiches pourront-elles sembler bien incomplètes aux cinéphiles qui les consulteront. Elles ont cependant le mérite de se baser sur des éléments dûment vérifiés.
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Article de presse à la sortie du film
ON se demande ce qui justifie le choix d'« Un divorce heureux » pour la soirée inaugurale du Festival de Cannes. Redoutable et périlleux honneur, d'autant moins explicable que, hors compétition, « La Flûte enchantée », de Bergman, « The Romantic English woman », de Losey, « Profession reporter », d'Antonioni, ou « Le Jour des sauterelles », de Schlesinger, auraient permis des ouvertures brillantes. Auprès de ces grands, le « Divorce heureux », d'Henning Carlsen, ouvrage estimable, paraît bien mince ; c'est aussi une déception par rapport aux précédentes réalisations de l'auteur de « La Faim ».
Un regard danois
Henning Carlsen a très
nettement expliqué pourquoi il avait choisi de
tourner en France et avec
des acteurs français : il
souhaitait que son film
soit vu par un maximum
de spectateurs. Or, le Danemark compte peu d'habitants, peu de cinémas,
peu de cinéphiles et pas le
moindre sanglier, dont la
traque constitue l'un des
temps forts d' « Un divorce heureux ».
Cela est clair. Mais à ce
drame psychologique qui
se déroule dans la région
de Houdan, Henning Carlsen applique une sensibilité et un regard danois
dépaysé ; il dévoile des aspects d'une vie française
tout à fait à côté de la
vérité. Le film raconte
comment Jean-Baptiste,
médecin de province aisé,
chassant un dimanche sur
ses terres, découvre inanimé un jeune homme qui
a tenté de se suicider.
Avec l'aide d'Antoine, devenu son meilleur ami depuis qu'il a épousé Marguerite, son ex-femme, il
le ramène chez lui, lui administre un lavage d'estomac efficace, l'installe
dans une chambre d'amis
et parie de lui rendre la
joie de vivre.
La philosophie du plaisir
Au réveil, François le
suicidaire se montre curieusement agressif et
Jean-Baptiste va jouer
de toute la panoplie de
sa philosophie du plaisir
pour tenter de le séduire : petits plats, vins
capiteux, jolies filles, musique et confort d'une belle maison. Il va même jusqu'à l'initier à la chasse,
où il est passé maître.
Tout en s'incrustant chez
son hôte, François ne lui
témoigne qu'hostilité. Il
lui en veut de l'avoir sauvé et de tenter de le prendre aux rets d'un confort
intellectuel sous lequel il
a découvert une profonde
vulnérabilité. Sa désinvolture souriante, — Jean-Baptiste se plaît à dire
qu'il a même réussi un divorce heureux — Francois va s'efforcer de la
saccager et y réussit au-delà de toute espérance.
Les rapports entre les
deux hommes sont à la
fois complexes et flous et
finalement assez artificiels. Et la mise en scène
si peu sûre que, de malentendu en porte-à-faux,
Henning Carlsen finit par
prouver à peu près le
contraire de ce qu'il s'était
proposé : le médecin qu'il
voulait nous montrer
égoïste, possessif et dominateur, est beaucoup plus
sympathique que le suicidaire contestataire pour
lequel il avait des tendresses.
De toute façon, il faut
tout le talent des comédiens, et notamment le
naturel tranquille de Jean
Rochefort dans le rôle de
Jean-Baptiste et celui de
Bulle Ogier dans celui de
Marguerite, pour insuffler
une sorte de vérité et
d'émotion à ce film. Plus
discutable se révèle le
choix d'André Dussolier
dans le rôle de François.
Cet excellent jeune premier n'est guère convaincant ici en agressif
perfide.