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Distribution :
Si les fiches que je réalise pour BDFF pèchent parfois par leur non-exhaustivité côté distribution, c'est que je n’ai pu réunir le nom de tous les acteurs, faute de preuves.
En effet, la passion du cinéma qui m’anime ne m’assure pas toujours les moyens d’investigations suffisants, aussi certaines fiches pourront-elles sembler bien incomplètes aux cinéphiles qui les consulteront. Elles ont cependant le mérite de se baser sur des éléments dûment vérifiés.
Images du film :
Toutes les images sont cliquables pour les obtenir en plus grand.
Document sans nom
SYLVIE Madame Berthe Bertini Malka RIBOWSKA Rosalie Victor LANOUX Pierre, petit-fils de Berthe Jean BOUISE Alphonse Étienne BIERRY Albert Bertini, fils de Berthe François MAISTRE Gaston Bertini, fils de Berthe Armand MEFFRE Ernest, patron du Bar Moderne Pascale DE BOYSSON Simone, femme de Gaston Léna DELANNE Victoire Jean-Louis LAMANDE Charles Robert BOUSQUET Robert, fils de Berthe André THORENT Dufour, le vendeur de voitures Pierre DECAZES Charlot, patron du Bar Amical Jeanne HARDEYN Rose, fille de Berthe André JOURDAN Lucien Max AMYL René MORARD
Document sans nom
Ce n’est qu’au terme d’une carrière de soixante ans que Louise Sylvie va connaître la consécration internationale pour « La vieille dame indigne » (1964), son dernier film et son seul premier rôle en trente ans de cinéma parlant : elle reçoit successivement le prix d’interprétation féminine au Festival de Rio de Janeiro, l’Etoile de Cristal de l’Académie du Cinéma Français et, en 1967, elle est la première actrice récompensée par la « National Society of Film Critics » nouvellement créée aux Etats-Unis.
Pour les cinéphiles, Sylvie reste associée à nombre de classiques des années 30 à 50, de « Carnet de bal » (1937) au « Miroir à deux faces » (1958), cumulant à plaisir les rôles de mère possessive ou de femme aigrie. Elle fut venimeuse à souhait dans « La fin du jour » (1939) ou « Le père Goriot » (1945) et doit l’une de ses prestations les plus mémorables à Marcel Carné qui la choisit pour « Thérèse Raquin » (1953) : belle-mère déplaisante de Simone Signoret, elle ne se remet pas de la disparition de son fils et assiste, paralysée, aux manœuvres du couple meurtrier qu’elle poursuit de sa haine par la force seule de son regard.
Mais ce n’était là qu’une facette de la carrière cinématographique car elle joua aussi de belles figures maternelles comme la bienveillante prieure des « Anges du péché » (1943). Bien sûr, dans « Le Corbeau » (1943), elle se transforme sous ses voiles de veuve en déesse de la vengeance mais dans « Romance de Paris » (1941) où elle joue la mère de Charles Trénet, on la voit rire à l’écran. Vieille dame aveugle dans « Marie-Martine » (1942), elle défend à coups de canne le bonheur de son fils (Bernard Blier) menacé par Jules Berry en maître-chanteur fielleux. Elle fut encore Madame Cristina, l’institutrice retraitée du « Petit monde de Don Camillo » (1951), la courageuse vieille mère de « Michel Strogoff » (1956) et la tendre aïeule de « Journal intime » (1961), visitée à l’hospice par ses deux petits-fils incarnés par Marcello Mastroianni et Jacques Perrin.
C’est justement en voyant « Journal intime » qu’un cinéaste débutant lui propose la vedette de son premier film : il lui faudra batailler un an durant pour imposer Sylvie à ses producteurs qui réclament une tête d’affiche plus commerciale, Danielle Darrieux - qui n’a pourtant que 47 ans - ou Margaret Rutherford alias Miss Marple ! Mais pour René Allio, la vieille dame indigne, ce sera Sylvie, malicieuse et entêtée, dans le rôle de Madame Bertini qui découvre le monde à la mort de son mari, se promène en calèche sur le Vieux Port, s’achète une 2CV et refuse les conventions dictées par ses enfants, pressés de toucher leur héritage. Le film, qui débute sur un portrait de Sylvie jeune fille et la chanson de Jean Ferrat « On ne voit pas le temps passer », restera à l’affiche toute une année. Plus que les récompenses, ce qui touchera le plus la comédienne ce seront les nombreuses lettres de spectatrices qui lui décrivent leur morne quotidien et leurs rêves d’évasion. C’est avec le sentiment du devoir accompli que Sylvie quittera les écrans sur ce triomphe populaire : « Je n’ai pas raté ma vieillesse ! » affirmera-t-elle fièrement à Pierre Dumayet qui l’interviewe pour son émission « Vocations » en 1969, année de ses 86 ans.
Jean-Paul Briant, Mai 2021
Critique de l'époque :
POUR 6,50 F seulement, au Studio de l'Etoile ou à la Pagode, les amateurs de cinéma peuvent voir un film d'une grande qualité et d'une étonnante délicatesse de touche : « La Vieille Dame indigne », inspiré à René Allio (homme de théâtre, metteur en scène et décorateur chez Planchon, au Théâtre de la Cité de Villeurbanne) par une nouvelle de Bertolt Brecht. Sur un sujet très original, c'est l'œuvre la plus claire, la plus heureuse et la plus tranquillement scandaleuse que l'on ait vue depuis bien longtemps au cinéma. La vedette s'appelle Sylvie ; ce n'est pas celle à laquelle vous pensez, mais cette comédienne chevronnée qui a inquiété dans « Belphégor » et qui trouve, à 84 ans, ce qu'elle appelle le rôle de sa vie.
«La Vieille Dame indigne » perd son mari au début du film. Tous ses enfants et les enfants de ses enfants accourent. Pauvre chère maman. En même temps, ils s'installent autour de la table et la vieille dame les sert comme elle l'a fait toute sa vie, humble esclave de son mari, de ses enfants, de leur égoïsme et des habitudes. Ce sera la dernière fois. Soudain, le regard de la vieille dame s'aiguise et s'illumine ; après une vie de sacrifices, elle va vivre son bonheur à elle.
Comme une enfant, elle découvre le monde et s'émerveille : à elle aussi, il appartient. Elle en emporte des parcelles sous forme de glaces à la vanille, de séances de cinéma, de promenades en fiacre, de nouveautés d'art ménager, surtout sous forme d'amitié. Car la vieille dame, libre, délivrée de ses servitudes familiales a trouvé des amis selon son cœur : une fille légère qui l'entoure de tendresse et un cordonnier philosophe (Jean Bouise, merveilleux dans le rôle) avec lesquels elle apprend à rire.
Est-ce ainsi que doit se conduire une veuve ? La vieille dame indigne ne s'en soucie point. Le scandale qu'elle suscite, l'indignation de ses enfants, peu lui chaut ! Elle se livre aux caprices de son bon plaisir jusqu'à sa mort. Sa joie de vivre aura duré dix-huit mois.
Très joliment photographié dans les décors naturels de Marseille, anticonformiste avec une simplicité ingénue, le film de René Allio (son premier film) possède une saveur rare. Il ne cherche jamais à provoquer mais sa morale démolit toutes les idées reçues et enchante par son naturel. Mme Sylvie a bien raison de penser que c'est là le rôle de sa vie, elle y est bouleversante et plus troublante qu'une star.
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Etienne Bierry et Jeanne Hardeyn
SYLVIE Madame Berthe Bertini Malka RIBOWSKA Rosalie Victor LANOUX Pierre, petit-fils de Berthe Jean BOUISE Alphonse Étienne BIERRY Albert Bertini, fils de Berthe François MAISTRE Gaston Bertini, fils de Berthe Armand MEFFRE Ernest, patron du Bar Moderne Pascale DE BOYSSON Simone, femme de Gaston Léna DELANNE Victoire Jean-Louis LAMANDE Charles Robert BOUSQUET Robert, fils de Berthe André THORENT Dufour, le vendeur de voitures Pierre DECAZES Charlot, patron du Bar Amical Jeanne HARDEYN Rose, fille de Berthe André JOURDAN Lucien Max AMYL René MORARD
Ce n’est qu’au terme d’une carrière de soixante ans que Louise Sylvie va connaître la consécration internationale pour « La vieille dame indigne » (1964), son dernier film et son seul premier rôle en trente ans de cinéma parlant : elle reçoit successivement le prix d’interprétation féminine au Festival de Rio de Janeiro, l’Etoile de Cristal de l’Académie du Cinéma Français et, en 1967, elle est la première actrice récompensée par la « National Society of Film Critics » nouvellement créée aux Etats-Unis.
Pour les cinéphiles, Sylvie reste associée à nombre de classiques des années 30 à 50, de « Carnet de bal » (1937) au « Miroir à deux faces » (1958), cumulant à plaisir les rôles de mère possessive ou de femme aigrie. Elle fut venimeuse à souhait dans « La fin du jour » (1939) ou « Le père Goriot » (1945) et doit l’une de ses prestations les plus mémorables à Marcel Carné qui la choisit pour « Thérèse Raquin » (1953) : belle-mère déplaisante de Simone Signoret, elle ne se remet pas de la disparition de son fils et assiste, paralysée, aux manœuvres du couple meurtrier qu’elle poursuit de sa haine par la force seule de son regard.
Mais ce n’était là qu’une facette de la carrière cinématographique car elle joua aussi de belles figures maternelles comme la bienveillante prieure des « Anges du péché » (1943). Bien sûr, dans « Le Corbeau » (1943), elle se transforme sous ses voiles de veuve en déesse de la vengeance mais dans « Romance de Paris » (1941) où elle joue la mère de Charles Trénet, on la voit rire à l’écran. Vieille dame aveugle dans « Marie-Martine » (1942), elle défend à coups de canne le bonheur de son fils (Bernard Blier) menacé par Jules Berry en maître-chanteur fielleux. Elle fut encore Madame Cristina, l’institutrice retraitée du « Petit monde de Don Camillo » (1951), la courageuse vieille mère de « Michel Strogoff » (1956) et la tendre aïeule de « Journal intime » (1961), visitée à l’hospice par ses deux petits-fils incarnés par Marcello Mastroianni et Jacques Perrin.
C’est justement en voyant « Journal intime » qu’un cinéaste débutant lui propose la vedette de son premier film : il lui faudra batailler un an durant pour imposer Sylvie à ses producteurs qui réclament une tête d’affiche plus commerciale, Danielle Darrieux - qui n’a pourtant que 47 ans - ou Margaret Rutherford alias Miss Marple ! Mais pour René Allio, la vieille dame indigne, ce sera Sylvie, malicieuse et entêtée, dans le rôle de Madame Bertini qui découvre le monde à la mort de son mari, se promène en calèche sur le Vieux Port, s’achète une 2CV et refuse les conventions dictées par ses enfants, pressés de toucher leur héritage. Le film, qui débute sur un portrait de Sylvie jeune fille et la chanson de Jean Ferrat « On ne voit pas le temps passer », restera à l’affiche toute une année. Plus que les récompenses, ce qui touchera le plus la comédienne ce seront les nombreuses lettres de spectatrices qui lui décrivent leur morne quotidien et leurs rêves d’évasion. C’est avec le sentiment du devoir accompli que Sylvie quittera les écrans sur ce triomphe populaire : « Je n’ai pas raté ma vieillesse ! » affirmera-t-elle fièrement à Pierre Dumayet qui l’interviewe pour son émission « Vocations » en 1969, année de ses 86 ans.
Jean-Paul Briant, Mai 2021
Critique de l'époque :
POUR 6,50 F seulement, au Studio de l'Etoile ou à la Pagode, les amateurs de cinéma peuvent voir un film d'une grande qualité et d'une étonnante délicatesse de touche : « La Vieille Dame indigne », inspiré à René Allio (homme de théâtre, metteur en scène et décorateur chez Planchon, au Théâtre de la Cité de Villeurbanne) par une nouvelle de Bertolt Brecht. Sur un sujet très original, c'est l'œuvre la plus claire, la plus heureuse et la plus tranquillement scandaleuse que l'on ait vue depuis bien longtemps au cinéma. La vedette s'appelle Sylvie ; ce n'est pas celle à laquelle vous pensez, mais cette comédienne chevronnée qui a inquiété dans « Belphégor » et qui trouve, à 84 ans, ce qu'elle appelle le rôle de sa vie.
«La Vieille Dame indigne » perd son mari au début du film. Tous ses enfants et les enfants de ses enfants accourent. Pauvre chère maman. En même temps, ils s'installent autour de la table et la vieille dame les sert comme elle l'a fait toute sa vie, humble esclave de son mari, de ses enfants, de leur égoïsme et des habitudes. Ce sera la dernière fois. Soudain, le regard de la vieille dame s'aiguise et s'illumine ; après une vie de sacrifices, elle va vivre son bonheur à elle.
Comme une enfant, elle découvre le monde et s'émerveille : à elle aussi, il appartient. Elle en emporte des parcelles sous forme de glaces à la vanille, de séances de cinéma, de promenades en fiacre, de nouveautés d'art ménager, surtout sous forme d'amitié. Car la vieille dame, libre, délivrée de ses servitudes familiales a trouvé des amis selon son cœur : une fille légère qui l'entoure de tendresse et un cordonnier philosophe (Jean Bouise, merveilleux dans le rôle) avec lesquels elle apprend à rire.
Est-ce ainsi que doit se conduire une veuve ? La vieille dame indigne ne s'en soucie point. Le scandale qu'elle suscite, l'indignation de ses enfants, peu lui chaut ! Elle se livre aux caprices de son bon plaisir jusqu'à sa mort. Sa joie de vivre aura duré dix-huit mois.
Très joliment photographié dans les décors naturels de Marseille, anticonformiste avec une simplicité ingénue, le film de René Allio (son premier film) possède une saveur rare. Il ne cherche jamais à provoquer mais sa morale démolit toutes les idées reçues et enchante par son naturel. Mme Sylvie a bien raison de penser que c'est là le rôle de sa vie, elle y est bouleversante et plus troublante qu'une star.
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