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APRES « Les Zozos », le film qui le révéla en 1972, Pascal Thomas nous propose, avec « Confidences pour confidences », quelque chose comme « Les Zozottes, chronique d'une modeste famille enrichie de trois filles ».
C'est Brigitte, la plus
jeune, qui nous raconte l'histoire des siens depuis ses
huit ans. Maman tient une
petite épicerie à Courbevoie, elle fait crédit à la
plupart de ses pratiques, ce
qui explique qu'on n'est pas
riche. D'autant plus que
papa (Daniel Ceccaldi) est
un remarquable flemmard.
Le soir, le deux-pièces audessus de la boutique se
transforme en roulotte dortoir avec une joie qu'on ne
s'explique guère. Une bronchite récidivante conduit
Brigitte à faire un séjour
prolongé chez ses grands-parents, à la campagne ;
elle y apprend quelques-unes
des choses de la vie. A son
retour, la petite famille a
déménagé. Maman reste à la
maison et, à son vif regret,
papa travaille. Les filles
commencent à vouloir
s'émanciper. Pierrette, l'aînée, se retrouve assez vite
enceinte et elle épouse un
bon garçon avec lequel elle
fera joyeusement quantité
d'enfants. Pierrette n'aime
vivre qu'entre biberons et
couches-culottes. Florence
devient très snob ; elle se
voit déjà au septième ciel
avec un soupirant bien né
qui lui offre, finalement, une chambre de bonne au sixième, mais comme, à son tour,
elle est enceinte, elle ravale
sa déception et se marie
aussi. Maman fait une fugue
totalement invraisemblable
qui inquiète toute la famille,
mais réjouit fort ce vieux
cocu de cousin Gabriel (superbe numéro de Galabru).
Et Brigitte, à son tour, met
au monde un superbe bébé
qui meurt sans raison le
lendemain même de sa naissance. Tout d'un coup, Pascal Thomas a décidé de virer au drame comme on
change de jeu. C'est si totalement gratuit qu'on ne
marche pas du tout en dépit
d'Anne Caudry, qui incarne
Brigitte avec subtilité et
amorce le virage contestataire de son héroïne.
Car cette histoire, portraits, anecdotes, rencontres, amitiés, amours, déceptions, trahisons, mariages, enfants, fugues, court sur une quinzaine d'années, de 1950 à 1965. Inutile de préciser que la contracepttion n'était pas entrée dans les mœurs et que Mai 68 ne pointait pas encore à l'horizon ; pourtant, déjà, dans l'air, quelque chose l'annonçait. Pour Pascal Thomas, ces années-là sont celles de son adolescence et il aimerait en ressusciter l'atmosphère autour de la famille Roussel. Ne vous emballez pas et n'espérez pas le grand air de la nostalgie. Tout reste ici bien artificiel. Les caractères mal cernés, réduits au schéma, ne font guère convaincants, et la mère, par exemple (c'est un comble) est incroyablement inexistante. Le biais de la caricature déforme une réalité qui aurait pu être drôle et touchante si la sincérité des auteurs avait été au rendez.vous. Elle ne l'est pas et cela s'entend. Le film sonne faux et, en outre, il manque de ton. Il passe d'un registre à un autre en appuyant lourdement sur des effets extérieurs ; on a l'impression d'assister à des sketches plus ou moins bien venus (celui de Lelouch est très cocasse). Pas question de s'embarrasser de psychologie, mais en voulant plaire à tout prix, on risque de décevoir un peu tout le monde. Au bout du compte, la comédie n'est ni plaisante ni déplaisante. Il lui arrive, par moments, d'être assez drôle, mais son manque de finesse et de sensibilité est surprenant pour qui prétend raconter les années de formation de trois jeunes filles et se pique de réalisme. Pascal Thomas n'est pas Marivaux, nous le savions déjà, il ne suffit pas d'un titre allusif pour faire illusion. J. M.