Renée Faure | Naissance : 1918 Décès : 2005 | Partager cette page sur Facebook : | Commentaire |
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1941
L'assassinat du Père Noël
1943
Les anges du péché
1944
Sortilèges
1945
François Villon
1946
Torrents
1952
Adorables créatures
1956
Virage dangereux
1956
Le sang à la tête
1958
Cargaison blanche
1959
Rue des prairies
1960
Port Royal
1961
Le président
1961
Le Procès de Sainte Thérèse de l'Enfant ...
1965
Le théâtre ...
David Copper...
1965
La Misère et la gloire d'Alexandre Dumas...
1966
Les sultans
1970
Lancelot du lac
1970
Ils étaient tous mes fils
1970
Axël
1972
Les gens de Mogador
1972
Pot-Bouille
1973
Le temps de vivre, le temps d'aimer
1973
Témoignages
Le dernier mot
1973
Trois diamants plus une femme
1974
Madame Bovary
1974
Un jeune homme seul
1975
La chasse aux hommes
1975
Il était une gare
1977
Recherche dans l'intérêt des familles : ...
1977
Un neveu silencieux
1979
Les dossier...
Mort non nat...
1980
L'enterrement de Monsieur Bouvet
1981
Mémoires de deux jeunes mariées
1981
Les amours ...
La messagère
1981
Une fugue à Venise
1981
Le sang des Atrides
1981
FEMMES FEMMES FEMMES : L'ange noir
1982
Paris Saint-Lazare
1983
Le Général a disparu
1984
L'âge vermeil
1985
L'amour en douce
1988
La petite voleuse
1989
Les grandes familles
1989
La grande cabriole
1990
Héritage oblige
1990
Les cinq de...
Le miroir au...
1994
Un ange passe
1999
Une femme d...
Mort en eaux...
Renée FAURE
A l’époque des répétitions de « La reine morte », Montherlant voyait en elle un « petit taureau » : si la comparaison peut surprendre, elle révèle le caractère volontaire d’une comédienne qui, en soixante ans de carrière, passa sans encombres des rôles de jeune première aux grandes héroïnes tragiques du répertoire avant de s’amuser, en fin de parcours, à jouer les vieilles dames indignes. En 1937, elle devient à vingt ans la plus jeune sociétaire de la Comédie Française où elle fait son apprentissage sous la direction de Pierre Dux et Jean-Louis Barrault. « Rieuse, blagueuse, naturellement gavroche » dans la vie selon les mots de Jacques Charon, elle est vouée sur scène aux grands personnages tragiques, ce qui ne l’empêche pas de briller dans le rôle de la sage Henriette des « Femmes savantes ». « Le Dialogue des Carmélites » de Bernanos, en 1961, lui permet de démontrer toute sa sensibilité grâce au personnage de Blanche de La Force, la jeune religieuse destinée à la guillotine ; en 1987, elle retrouve la pièce, cette fois dans le rôle de la vieille prieure terrifiée par la mort : une dernière fois, elle impressionnera les spectateurs.
Son parcours cinématographique reste limité puisqu’il ne comporte qu’une trentaine de titres. Dès son premier film, « L’assassinat du Père Noël » en 1941, elle s’impose pourtant comme l’une des plus attachantes jeunes premières du cinéma français de l’Occupation. Christian-Jaque - qui n’est pas insensible à son charme puisqu’il l’épousera en 1947 - la dirige à nouveau en jeune femme rêveuse face à un univers hostile dans « Sortilèges » puis dans « La Chartreuse de Parme » où elle incarne Clelia Conti. En revanche, « François Villon » (1945) la montre en grande dame acoquinée aux mauvais garçons ; quant à Sigrid, l’héroïne solaire de « Torrents » (1946), elle s’avère une femme jalouse, prête à tout pour retrouver son amour d’enfance. Sur un mode mineur, elle joue « Le prince charmant » (1941), « Béatrice devant le désir » (1943) et même un mélodrame italien, « La grande aurora » (1947). Mais son plus beau rôle, elle le doit à Robert Bresson : Anne-Marie, la novice des « Anges du péché » (1943), brûlée de l’intérieur par une foi à toute épreuve, ira jusqu’au bout de ses forces pour sauver l’âme d’une détenue en révolte jouée par Jany Holt.
Le rythme des participations cinématographiques va se ralentir nettement dès le milieu des années 50 puisqu’elle ne tournera que douze films en 40 ans. Charles Spaak et Christian-Jaque lui réservent une partition ironique dans « Adorables créatures » (1952) ; elle participe aussi en 1954 à « Raspoutine » ou « Bel Ami » mais le théâtre l’emporte alors. On ne peut que le regretter car la plupart de ses prestations seront mémorables. « Cargaison Blanche » (1958) joue sur son air distingué pour nous faire douter qu’elle puisse diriger en sous-main un trafic clandestin de jeunes filles. Partenaire de Jean Gabin à trois reprises, on la voit en avocate mondaine dans « Rue des Prairies » (1959) mais elle brille particulièrement dans deux adaptations de Simenon : gouvernante des enfants du Fils Cardinaud, elle en est secrètement amoureuse mais se fait remettre à sa place sur de belles répliques d’Audiard dans « Le sang à la tête » (1956) ; dans « Le Président » (1960), elle joue Milleran, secrétaire en apparence fidèle du patriarche de la politique. Bertrand Tavernier lui confie le rôle caustique d’une redoutable dame patronnesse, mère de Philippe Noiret, dans « Le juge et l’assassin » (1976) : le cinéaste et son scénariste Jean Aurenche se sont visiblement délectés de lui faire énoncer les pires horreurs – « éventration, viol, égorgement… » - la mine offensée et gourmande. En 1988, dans « La petite voleuse », scénario de Truffaut mis en scène par Claude Miller, son rôle est aussi bref que saisissant : avorteuse au look de sorcière, elle terrifie la jeune Charlotte Gainsbourg. Renée Faure retrouve Simenon pour un rôle plus conséquent, celui de Fine, gouvernante de Lourçat (Jean-Paul Belmondo) dans « L’inconnu dans la maison » (1992) mais ce ne sera qu’un coup d’épée dans l’eau : était-il bien utile de s’attaquer à un remake du film de Henri Decoin cinquante ans après Raimu ?
Heureusement, la télévision réparera cette injustice. Dès le début des années 60, elle fréquente assidûment la petite lucarne : « David Copperfield » (1965), « Lancelot du Lac » (1970), « Les gens de Mogador » en 1972 - elle y joue la mère de Marie-José Nat – ou « Madame Bovary » en 1974 – en austère belle-mère de Nicole Courcel - enfin « La grande cabriole » de Nina Companeez en 1989, ce sont quelques titres célèbres au milieu d’une cinquantaine de rôles. Elle peut se montrer drôle et caustique en archiduchesse dans « Les Mystères de Paris » (1980) ou carrément odieuse en grand-mère d’un enfant trisomique qu’elle ne supporte pas dans l’œuvre émouvante de Robert Enrico, « Un neveu silencieux » (1977). En fin de carrière, Edouard Molinaro lui attribuera quelques personnages savoureux, entre autres dans « Les grandes familles » (1988) où elle forme un vieux couple attendrissant avec Jean-Pierre Aumont. Ils étaient déjà partenaires dans « L’âge vermeil » (1984), aux côtés de Danielle Darrieux et Suzy Delair, où cette belle brochette de vétérans animait un club du troisième âge détonant. En 1991, elle retrouve Simenon, cette fois pour la bonne cause : face à Bruno Cremer, elle se montre magistrale en mère odieuse et criminelle de Michael Lonsdale dans « Maigret et la grande perche » : décidément, la rosserie lui sied bien !
Décédée en 2005, cette comédienne respectable ne manquait pas de répartie comme le prouve sa réponse inattendue à un journaliste qui l’interrogeait sur ses passions : « La pêche à la ligne ! Dès que je le puis, je me rends dans ma bicoque de la Nièvre, harponner des truites saumonées. »
Jean-Paul Briant