Mary Marquet | Naissance : 1895 Décès : 1979 | Partager cette page sur Facebook : | 1 Commentaire |
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1952
Piédalu fait des miracles
1952
Foyer perdu
1953
Si Versailles m'était conté
1953
Lettre ouverte
1955
Les hommes en blanc
1955
Le secret de soeur Angèle
1960
Au voleur
1962
Chéri
1962
Arsène Lupin contre Arsène Lupin
1963
Landru
1963
Le Contrôleur des wagons-lits
1965
Quelle famille !
1965
La vie de château
1966
Le jardinier d'Argenteuil
1966
Les combinards
1966
La grande vadrouille
1967
Des garçons et des filles
1967
Ce sacré grand-père
1968
Phèdre
1968
Les cinq de...
Traitement d...
1968
Les dossier...
Emile à Cannes
1968
Les saintes...
Eve et les g...
1969
Bruno, l'enfant du dimanche
1971
La Visite de la vieille dame
1972
Les enquête...
Maigret se f...
1973
Par ici, la monnaie
1974
Lucien Leuwen
1974
Un curé de choc : Le retour de la baronn...
1974
Le mouton enragé
1975
Le malin plaisir
1977
Une fille cousue de fil blanc
Mary MARQUET
Mary Marquet considéra toujours à juste titre sa carrière théâtrale – née sous le parrainage de Sarah Bernhardt et d’Edmond Rostand - comme plus importante que sa contribution au grand écran. Engagée à la Comédie-Française en 1923, elle devient la grande prêtresse du théâtre classique, qu’elle joue Andromaque, Célimène ou Lucrèce Borgia. « Athalie » lui vaut la légion d’honneur pour services rendus à Racine, ce dont elle n’était pas peu fière, la modestie n’étant pas sa qualité première. Arrêtée à la Libération pour collaboration, elle est limogée du Français : on lui reproche d’avoir rédigé des chroniques dans un journal pétainiste et d’avoir participé aux émissions de « Radio-Paris ». A contrario de l’exemple maternel, son fils François avait choisi d’entrer dans la résistance : arrêté, il fut déporté à Buchenwald où il mourut, drame dont sa mère ne se remit pas.
Après-guerre, Mary Marquet change de registre grâce au succès d’« Interdit au public », adapté au cinéma par Pasquali. Jusque là, elle avait tenu le premier rôle en 1922 dans « La ferme du Choquart » avant de paraître auprès de Harry Baur dans le dernier film de la grande Sarah, « La voyante » (1924). Son unique film des années 30, « Sapho » (1934), fut un échec qui la détourna du cinéma mais, la cinquantaine bien tassée, elle y revint régulièrement. Dans un premier temps, elle manque de clairvoyance quant au choix de ses réalisateurs : trois films signés Léo Joannon et trois Jean Loubignac, est-ce bien raisonnable ? Passe encore pour l’aristocrate agitée du « 84 prend des vacances » (1949) mais « Piédalu fait des miracles » (1952) où elle préside un club nautique n’est qu’une galéjade ; du même Loubignac, elle venait d’interpréter le sinistre « Foyer perdu » (1951) dont le titre initial, « Tu es un imbécile », fut prudemment modifié pour déjouer l’ironie critique. Dans « Le secret de sœur Angèle » (1955), elle joue la mère supérieure du couvent de Marseille puis la voilà en patronne d’auberge chez Ralph Habib dans « Au voleur » (1960). « Les hommes en blanc » (1955) attire davantage notre attention car elle y a Jeanne Moreau et Raymond Pellegrin pour partenaires et campe une infirmière nommée Ledragon. « Lettre ouverte » (1953) d’Alex Joffé, où elle joue la belle-mère de Robert Lamoureux, est plus réussi, de même que « Minuit, Quai de Bercy » (1952) où on la voit en grand-mère alcoolique. Surtout, Sacha Guitry l’invite à lui donner la réplique dans « Si Versailles m’était conté » (1953) où elle sera sa royale épouse, Madame de Maintenon.
Les années 60 imposent une image finalement sympathique de grand-mère autoritaire, le verbe haut et la canne impérieuse : sa popularité est alors réelle, ce dont elle se félicitait, éternellement convaincue semble-t-il que le monde tournait autour de sa haute carcasse. Reine-mère de Moldavie dans « Arsène Lupin contre Arsène Lupin » (1962), elle travaille pour Claude Chabrol dans « Landru » (1963) où elle appelle Charles Denner « mon poète, mon grand fou » sans se douter qu’elle doit terminer ses jours dans la fameuse cuisinière de Gambais. Jean Gabin la recrute pour un rôle d’antiquaire – son hobby dans la réalité - dans « Le jardinier d’Argenteuil » (1966). Le rôle est bref mais c’est dans « La grande vadrouille » (1966) qu’elle trouve son interprétation la plus célèbre. Mère supérieure aux Hospices de Beaune, elle n’a pas son pareil pour lancer à Terry-Thomas alias Big Moustache : « Langue blanche, œil jaune, nez rouge : le foie ! Vous aimez bien tout ce qui est bon ? C’est très mauvais ! » Toutefois on lui préfère « La vie de château » (1966) où, châtelaine hostile à l’occupant, elle a Pierre Brasseur pour métayer : l’affrontement des deux monstres autour d’une table de billard est l’un des plaisirs de ce film euphorisant où on aime aussi la voir se griser de champagne ou conduire par le licol sa brave jument, Fifine.
Elle sera duchesse face à Michel Simon dans « Ce sacré grand-père » (1967) et retrouve sa copine Marie Bell dans « Phèdre » (1968) où elle joue Oenone. La télévision lui propose le rôle principal de « La visite de la vieille dame » (1971) mais elle paraît aussi dans des feuilletons célèbres comme « Les saintes chéries » (1968) où elle est la mère de Daniel Gélin. Raymond Souplex dans un épisode des « Cinq dernières minutes » et Jean Richard dans « Maigret se fâche » (1972) se font un plaisir de la mettre sur le grill. Enfin, pour Claude Autant-Lara, elle apparaît en vieille aristocrate au générique de « Lucien Leuwen » (1973). De grands cinéastes la réclament encore dès qu’un rôle d’aïeule se présente et c’est le cas de Michel Deville pour « Le mouton enragé » (1974) ou de Marcel Carné pour son dernier film, « La merveilleuse visite » (1974) où elle campe une duchesse illuminée. Comme pour couronner sa carrière au cinéma, Fellini la réclame à Cinecitta pour son « Casanova » (1976) : hélas, des dix jours de tournage, ne resteront que deux minutes de présence à l’écran en mère momifiée du séducteur vieillissant.
Ses mémoires - « Ce que j’ose dire… » (1974), « Ce que je n’ai pas dit… » (1976) et « Tout n’est peut-être pas dit » (1977) - sont de vrais succès de librairie qui ne manquent pas de verve. Comme son personnage dans le médiocre « Opération Lady Marlène » (1976), elle envisage sereinement un destin de centenaire mais une crise cardiaque vint à bout de ce monument national le 29 août 1979.
Jean-Paul Briant