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  •  Margo Lion  

      Naissance : 1899   Décès : 1989   Partager cette page sur Facebook :
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    Je plaide non coupable

    Les amours finissent à l'aube

    Je chante

    La femme que j'ai assassinée

    Document sans titre

    Margo LION 

    Née à Constantinople, égérie des nuits berlinoises au temps de la République de Weimar, amie et inspiratrice de Marlene Dietrich, chanteuse et comédienne, Margo Lion connut un parcours atypique avant de devenir une actrice de complément recherchée qui tourna près de soixante films en un demi-siècle de présence à l’écran. Lèvres minces, long nez, visage de sphinx, elle est particulièrement remarquable en adepte du spiritisme dans « L’homme de nulle part » mais c’est sa prestation dans « L’Opéra de Quat‘sous » qui reste gravée dans les mémoires lorsqu’elle interpréta de façon saisissante « La fiancée du pirate ».

    Gamine longiligne qui rêve de devenir danseuse, elle suit à Berlin les cours du Ballet Russe où elle rencontre le poète Marcellus Schiffer qui l’incite à tenter sa chance sur scène : elle débute en 1923 au cabaret Wilde Bühne - « La Scène Sauvage » ! - où elle chante la première chanson écrite à son intention par son futur mari : longue dame brune aux yeux cerclés de noir, cultivant un look androgyne, elle séduit le public. Une revue de Friedrich Hollaender fait de Margo Lion la coqueluche des nuits berlinoises. Elle se lie d’amitié avec la débutante Marlene Dietrich et lance l’idée d’un duo féminin sur le modèle des Dolly Sisters : leur chanson « Wenn die beste Freundin mit der besten Freundin » - qui évoque à mots couverts les amours saphiques - connaît un succès de scandale. A l’exception d’une apparition en 1926, le cinéma ne s’est guère intéressé à l’altière Margo lorsque Pabst la choisit pour le rôle de Jenny, la prostituée délaissée par Mackie, dans la version française de « L’opéra de quat’sous » (1930). Elle tourne alors une dizaine de films, signés Anatole Litvak, Kurt Gerron ou Robert Land. On la retrouve aux côtés de Peter Lorre dans « Stupéfiants » (1932) et « Les 13 malles de Monsieur O.F. » (1931), un film où, le lorgnon vissé à l’œil droit, elle chante au milieu de statues de femmes dénudées. Mais l’aventure berlinoise se termine tragiquement par le suicide de son époux et l’arrivée des nazis. Margo Lion rejoint la France : elle chante encore dans « La voix sans visage » (1933) et retrouve Pabst pour « Du haut en bas » (1933) avec Jean Gabin avant d’interpréter, chez Duvivier, Carné et surtout Pierre Chenal, un beau panel de femmes déchues.     

    Dans « La Bandera » (1935), elle porte le nom évocateur de Planche-à-Pain avant de fréquenter, sous le nom de Mme Vrack, la boîte tenue par Françoise Rosay alias « Jenny » (1936). Parmi les créatures étonnantes qui hantent ce premier film de Carné, Margo Lion n’est pas la moins remarquable. Pierre Chenal l’engage à trois reprises : dans « L’affaire Lafarge » (1937), elle s’appelle Aména  mais s’avère rien moins qu’amène en belle-sœur envieuse de Marcelle Chantal. « L’alibi » (1937) la montre sous un jour plus sympathique en entraîneuse à l’humour ravageur : Chenal s’amuse à filmer de profil son nez allongé qui contraste avec les rondeurs de Jean Temerson, son « fiancé » bien empoté. Son meilleur rôle reste celui de Melle Caporale dans « L’homme de nulle part » (1936) : cette femme extravagante nourrit les pigeons de Rome, roucoule avec Le Vigan et anime les soirées de la pension Paleari en convoquant l’esprit du « Grand Max » lors de savoureuses séances de spiritisme. Certains personnages s’avèrent plus sulfureux comme Dédée, la détenue de « La danseuse rouge » (1937), et surtout Mademoiselle Sergent, la directrice de « Claudine à l’école » (1937), un peu trop sensible au charme d’une institutrice. Dans « Je chante » (1938), elle retrouve le même cadre mais pour une œuvre bien moins subversive. A l’orée de la guerre, qui la verra disparaître des écrans jusqu’en 1945, elle retrouve Pabst dans « Jeunes filles en détresse »  (1939) pour une apparition en mère égoïste.

    Son retour à l’avant-scène ne manque pas d’intérêt : sur les planches du Théâtre Hébertot, elle crée le rôle de Caesonia dans « Caligula » d’Albert Camus auprès de Gérard Philipe. Au cinéma, elle renoue avec de vieilles connaissances, et d’abord dans « Martin Roumagnac » (1946) : sœur aimante de Jean Gabin, elle a les pieds sur terre et condamne la passion destructrice de son frère pour Marlene Dietrich. Le film lui donne un rôle consistant, ce qui sera rarement le cas par la suite. Malgré tout, le fidèle Pierre Chenal lui fait signe pour « La foire aux chimères » (1946) où elle joue la gouvernante d’Erich Von Stroheim – son partenaire la même année dans « La danse de mort ». Pepita, la servante jalouse de Charles Vanel dans « Le diable souffle » (1947), quitte bien vite l’écran, non sans avoir maudit la belle Héléna Bossis. Dans « Le furet » (1949), elle retrouve Jany Holt mais l’amitié n’est plus au rendez-vous car Margo incarne sa belle-sœur sadique. Loin de sa jeunesse berlinoise, la voilà qui passe du côté de la morale : elle réclame la fermeture d’une boîte de nuit dans « Une nuit à Tabarin » (1947) avant d’entrer dans les ordres pour « Mam’zelle Nitouche » (1953) et « Le dialogue des carmélites » (1959). On la distribue en surveillante de pension dans « Katia » (1959) ou en tenancière de tripot clandestin dans « Le fauve est lâché » (1958). Dans « Quai de Grenelle » (1950), elle dirige une boîte de strip-tease. On la voit en espionne polonaise ayant perdu la tête dans « Coplan prend des risques » (1963) ; pour Georges Franju, elle campe une servante boiteuse et ronchon dans « La faute de l’abbé Mouret » (1970). « Le fou du labo 4 » (1967) de Jacques Besnard - où elle joue la mère acariâtre de Jean Lefebvre - voisine dans sa filmographie avec l’œuvre de représentants de la Nouvelle Vague, Jacques Demy pour « Lola » (1961) ou Doniol-Valcroze pour « La bien-aimée » (1967) ; dans « La rupture » (1970) de Chabrol, elle propose, avec Maria Michi et Louise Chevalier, une version contemporaine des Trois Parques antiques et l’on en est aussitôt convaincus, c’est Margo qui coupe le fil de nos vies !

    Lorsque le ciné l’oublie, Margo Lion peut compter sur la télévision où elle débute en mère de « La Belle au bois dormant » (1954), une reine « aussi aimée qu’aimable » : ces compliments inusités jusque là semblent la convaincre puisqu’elle paraîtra régulièrement sur le petit écran pour une trentaine de rôles, tour à tour baronne dans « Le secret de Mayerling » (1956), bigote chez Marivaux dans « Le paysan parvenu » (1960) ou mère déchue chez Diderot dans « Jacques le Fataliste » (1963). Stellio Lorenzi, Claude Barma ou Marcel Bluwal sauront l’utiliser à bon escient et c’est ainsi qu’elle croise Belmondo en fougueux D’Artagnan dans « Les trois mousquetaires » (1959) ou Jean-Pierre Marielle dans « Notre petite ville » (1959). Elle hante les fictions policières comme « Les cinq dernières minutes » où Raymond Souplex n’aura pas de difficulté à la démasquer en habilleuse rancunière et coupable. Une inquiétude diffuse semble s’attacher à ses personnages lorsqu’elle incarne l’épouvantable Frochard dans « Les deux orphelines » (1961) ou la mère Agenoux dans « Le mystère de la chambre jaune » (1965).

    En 1963, Margo enregistre chez Deutsche Grammophon les chansons de Marcellus Schiffer. On imagine son émotion en 1977 lorsque, robe noire et longue écharpe rouge, elle donne un concert à Berlin. Son dernier rôle au cinéma sera celui de la mère d’Annie Girardot dans « Docteur Françoise Gailland » (1975). Quant à sa dernière apparition à la télévision, elle rappelle ses débuts puisqu’on la retrouve en diseuse de bonne aventure dans « Anthelme Collet ou le brigand gentilhomme » (1981). A 80 ans bien sonnés, Margo Lion se retire alors discrètement en Haute-Savoie. Elle meurt à quelques jours de son 90e anniversaire, le 25 février 1989.

    Jean-Paul Briant

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