Pierre Bertin | Naissance : 1891 Décès : 1984 | Partager cette page sur Facebook : | Commentaire |
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1931
Faubourg Montmartre
1936
Faisons un rêve
1939
Jeunes filles en détresse
1943
Le corbeau
1943
Au bonheur des dames
1946
Cyrano de Bergerac
1946
L'affaire du collier de la reine
1948
Le diable boiteux
1949
Orphée
1950
Tire au flanc
1950
Knock
1951
Monsieur Fabre
1956
Elena et les hommes
1959
Babette s'en va-t'en-guerre
1960
Le dialogue des carmélites
1960
Les bonnes femmes
1964
Comment épouser un premier ministre
1965
Les bons vivants
1966
La cerisaie
1966
La grande vadrouille
1967
La vie parisienne
1970
La pomme de son oeil
1972
Les évasion...
L'évasion du...
1972
Comme il vous plaira
1972
Absences répétées
1973
L'oiseau rare
1974
Au pays d'Eudoxie ou Le satyre de la Vil...
1975
Le pape kidnappé
1976
Robert Macaire
1976
Calmos
1977
La foire
1978
Le beaujolais nouveau est arrivé
1980
Les enquête...
Maigret et l...
1981
Le calvaire d'un jeune homme impeccable
Pierre BERTIN
En dépit de l’appréhension légitime de ses parents,
Pierre Bertin interrompit ses études de médecine à vingt ans pour se tourner
vers le théâtre. A l’Odéon, au Vieux-Colombier comme au Théâtre Michel, Bertin
défendit vaillamment les couleurs de l’avant-garde, jouant « Les mariés de la
Tour Eiffel » (1921) de Cocteau ou mettant en scène « Ruffian toujours, truand
jamais » (1920) de Max Jacob. La Comédie Française l’accueillit comme
pensionnaire en 1923 avant de le nommer sociétaire. Il s’illustra dans les
œuvres contemporaines de Pirandello et bien sûr, côté classiques, dans « Le
mariage de Figaro », « Le barbier de Séville » et « Le bourgeois gentilhomme »
où il dirige Raimu en 1944. Compagnon de Madeleine Renaud, il eut l’élégance de
s’effacer devant Jean-Louis Barrault ; aussi est-ce sans état d’âme qu’il leur
emboîta le pas, après-guerre, dans l’aventure de la Compagnie
Renaud-Barrault pour un parcours mémorable qui inclut « La cerisaie »,
« Hamlet » ou les couplets de « La vie parisienne » d’Offenbach. En 1975, les
spectateurs d’ « Au théâtre ce soir » l’applaudissent dans
« Le pape kidnappé », un dernier succès au terme d’une carrière bien
remplie.
En marge de cette activité incessante sur les
planches, Pierre Bertin trouva le temps de paraître régulièrement à l’écran
pendant une quarantaine d’années. Son premier emploi est celui de l’amoureux
emprunté, par exemple dans « L’amour chante » (1930) ou « La petite
chocolatière » (1931), film où Raimu l’aide à résoudre ses problèmes de cœur.
Il courtise Edwige Feuillère dans « Cordon Bleu » (1931), Gaby Morlay dans
« Faubourg Montmartre » (1931) ou Mireille Perrey dans « Je serai seule après
minuit » (1931). Le titre d’un film aujourd’hui oublié, « Le prof ingénu »
(1933), donne une bonne idée des personnages qui lui sont dévolus. Soupirant
ridicule de Dolly Davis, il se fait tabasser par des marlous et finit au poste
lors d’« Une nuit de folies » (1934). Les derniers avatars du personnage
paraissent dans « Jeunes filles en détresse » (1939) et « Mademoiselle
Béatrice » (1942) - où il s’appelle Archange et soupire toujours pour Gaby
Morlay. Toutefois, lorsqu’il adopte le fruit de l’un des « Péchés de jeunesse »
(1941) de Harry Baur, il s’est tant sacrifié pour cet enfant qui n’est pas le
sien qu’il reçoit en retour une belle déclaration d’amour filial.
La cinquantaine venue, son emploi évolue sur une note
parfois plus aigre. Fournisseur de Baudu (Michel Simon), il contribue à sa
ruine comme à la réussite commerciale de l’enseigne concurrente, « Au Bonheur
des Dames » (1943). Sous-préfet dans « Le Corbeau » (1943), son éloge funèbre
vire au cri de vengeance dont Marie Corbin sera la victime. Abbé de cour, il
trempe dans les manigances de Madame de La Motte à l’origine de « L’affaire du
Collier de la Reine » (1945). Toutefois, les vieux amoureux ou les notables
ridicules semblent lui convenir davantage. C’est ainsi que Jean Cocteau se
souvient de son interprète des années 20 pour en faire un « commissaire
spécial », complètement dépassé face à la disparition mystérieuse d’« Orphée »
(1949). De même, M. Bernard, l’instituteur à lorgnon de « Knock » (1950), se
laissera facilement embobiner par Louis Jouvet dont il ne saisit pas la
duplicité. Chez Jean Renoir, il compte au nombre des amoureux éperdus d’Ingrid
Bergman, dans « Elena et les hommes » (1955) : affligé d’un rejeton aussi benêt
qu’il l’était lui-même vingt ans plus tôt, on sait d’avance qu’il n’emportera
pas le cœur de la belle intrigante.
Il ne faisait que passer dans le prologue de
« Faisons un rêve » (1936), attendant une douzaine d’années le personnage que
Sacha Guitry lui réserve, celui du Baron de Nesselrode dans « Le diable
boiteux » (1948). Depuis « Cyrano de Bergerac » (1945) où il joue, précieux et
emperruqué, le Comte de Guiche, les titres de noblesse lui siéent : Colonel de
Brochard dans « Tire au flanc » (1949), M. de Saint-Brive dans « Mon phoque et
elles » (1951), Marquis de La Force dans « Dialogue des Carmélites » (1959),
Duc de Crécy dans « Babette s’en va-t-en guerre » (1959), il joue même Napoléon
III dans « Monsieur Fabre » (1951) et, plus tard, le Prince de Condé dans
« L’évasion du duc de Beaufort » (1972) tourné pour la télévision par
Christian-Jaque. Pour autant, il ne se pousse pas du col, et se moque des
coteries en tous genres, passant allègrement de la vieille garde
cinématographique - il joue dans
« Le château de la dernière chance » (1946) le professeur Patureau-Duparc,
inventeur d’un sérum miracle - à la Nouvelle Vague version Chabrol puisque
c’est lui qui dirige, l’œil égrillard, le magasin où s’ennuient « Les bonnes
femmes » (1960).
Grand-bourgeois sourdingue, il demande à Lino Ventura la main de sa pupille pour son fiston Claude Rich, au beau milieu de la fusillade finale des « Tontons flingueurs » (1963). Comme on l’aperçoit aussi en grand-père de Marie Dubois dans « La grande vadrouille » (1966), on peut dire qu’il a le nez creux puisqu’il assure sa postérité en participant à deux succès indémodables. A contrario, ni « L’étranger » (1967) – pourtant signé Visconti – ni les œuvres plus intimistes de Guy Gilles - « Absences répétées » (1971) – ou Jean-Claude Brialy - « L’oiseau rare » (1973) - ne rencontreront le public. Sa malice n’en reste pas moins intacte comme le prouve son apparition gouleyante en chanoine gourmand dans le « Calmos » (1975) de Bertrand Blier. Lorsque « Le beaujolais nouveau est arrivé » (1977), Pierre Bertin considère que l’heure des adieux a sonné. Il venait de publier un livre de souvenirs sous le meilleur titre qui soit : « Le théâtre est (et) ma vie » (1971).