Héléna Manson | Naissance : 1898 Décès : 1994 | Partager cette page sur Facebook : | 1 Commentaire |
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1925
La Vocation d'André Carel
1931
Le réquisitoire
1934
Madame Bovary
1935
Pension Mimosas
1936
Hélène
1941
L'assassinat du Père Noël
1941
Les inconnus dans la maison
1942
Le bienfaiteur
1942
Le journal tombe à cinq heures
1942
Marie-Martine
1943
Le corbeau
1943
L'homme de Londres
1943
Picpus
1948
Manon
1949
Retour à la vie
1950
Né de père inconnu
1950
Le furet
1951
La taverne de la Nouvelle-Orléans
1952
Le plaisir
1953
L'envers du paradis
1954
Escalier de service
1955
Lola Montes
1955
Le dossier noir
1955
Goubbiah, mon amour
1956
En votre âm...
L' Affaire P...
1956
En votre âm...
Une femme ho...
1957
Les truands
1957
Énigmes de l'histoire : Un nommé Charles...
1958
Faibles femmes
1958
Les cinq de...
D'une pierre...
1958
Le grand chef
1958
En votre âm...
L'affaire Vi...
1959
Clarisse Fenigan
1960
Le paysan parvenu
1960
En votre âm...
Mort d'un no...
1961
L'homme au parapluie
1961
Le président
1961
Les amours célèbres
1961
La chambre ardente
1965
Don Quichotte
1966
La conversation
1966
En votre âm...
Le Crime de ...
1966
Verdict : Un parmi des milliers
1966
Paris au mois d'août
1968
Un chat sur la ligne
1969
S.O.S. Fréquence 17 : Mystérieux objets ...
1971
Le tambour du Bief
1972
L'homme qui revient de Loin
1972
Comme avant, mieux qu'avant
1973
Le jeune Fabre
1974
A dossiers ouverts : La légende de l'ogr...
1974
Un mystère ...
La verte val...
1974
Arsène Lupin
La demeure m...
1975
La simple histoire d'un extraordinaire p...
1976
Le locataire
1977
La lune papa
1977
Un amour de jeunesse
1980
Mon oncle d'Amérique
1981
L'Homme au parapluie
1981
Un petit paradis
1982
Les misérables
1984
La dictée
1987
Agent trouble
1989
Les maris les femmes les amants
Héléna MANSON
Si on se réfère à son interprétation la plus célèbre, elle fut avant tout l’infirmière revêche du « Corbeau », le chef d’œuvre de Clouzot, qui devait laisser son empreinte sur la suite de sa carrière. Mais au théâtre en particulier, l’amère Héléna sut montrer bien d’autres facettes de son talent. Engagée dans la prestigieuse compagnie Pitoëff, elle participera à d’importantes créations comme celle de « Six personnages en quête d’auteur » de Pirandello.
Son premier film, en 1925, lui donne comme partenaire un débutant nommé Michel Simon, mais c’est à partir de 1930 qu’on la retrouvera régulièrement au cinéma, à raison parfois de quatre ou cinq films la même année. C’est à peine si on la remarque en bonne de Raimu dans « Le bienfaiteur » (1942) et, dans « Le Furet » (1949), elle trouvera le moyen de se faire étrangler dans les cinq premières minutes du film. A ses débuts, ses metteurs en scène s’appellent Pabst, Renoir ou Feyder mais son physique atypique - lèvres pincées, regard inquisiteur - ne lui vaut pas les premiers rôles. Epouse de mineur dans « La tragédie de la mine » (1931), rentière dans « Pension Mimosas » (1934), elle joue pourtant « Madame Bovary » (1933) pour Renoir, mais il s’agit de la première épouse de Charles Bovary, celle qui meurt aussitôt pour qu’entre en scène Valentine Tessier. Etudiante à lunettes dans « Hélène » (1936), elle est carrément considérée comme un laideron dans « Dernière jeunesse » (1939) où son rêve d’épouser Raimu s’anéantit lorsqu’apparaît la ravissante Jacqueline Delubac. Le bilan des années 30 paraît décevant et l’on comprend qu’elle préfère rejoindre les Pitoëff sur la scène du Théâtre des Mathurins.
Pourtant, les années 40 vont lui apporter la consécration. Sous la direction de bons cinéastes comme Christian-Jaque ou Henri Decoin, elle se spécialise un temps dans les mères attentionnées comme dans « Les inconnus dans la maison » (1941). Sa rencontre avec Clouzot lui apporte son heure de gloire : elle sera Marie Corbin, l’infirmière détestable, celle que la rumeur publique présente comme l’auteur des lettres anonymes. Lorsqu’elle fuit la vindicte populaire dans sa cape d’oiseau de malheur, elle est l’incarnation parfaite de la femme que l’on aime haïr. Ce rôle majeur va déteindre sur ses prestations ultérieures. Ainsi, dans « La ferme des sept péchés » (1947), elle joue la Michel, servante intraitable qui accable la mémoire de son maître assassiné. « Manon » (1948) nous la propose en commère haineuse et « Retour à la vie » (1949) en femme intéressée lorgnant sur l’héritage de sa tante. Lorsqu’il s’agit de doubler la marâtre de « Cendrillon » pour la version française du dessin animé de Disney, il ne pouvait y avoir d’autre choix que celui de notre Héléna ! La même année, elle joue la servante du veule Vincent Price dans « La taverne de la Nouvelle Orléans » tourné aux studios de la Victorine. Jusqu’à la fin de sa carrière, l’image de Marie Corbin plane sur ses apparitions, qu’elle soit infirmière à nouveau dans « Piège pour Cendrillon » (1965) ou « Le locataire » (1976), avorteuse dans « Des gens sans importance » (1955), gouvernante dans « La chambre ardente » (1961) ou logeuse de Depardieu dans « Mon oncle d’Amérique » (1980). Ses deux derniers rôles en sont la meilleure preuve : en 1988, on la retrouve chez Mocky dans « Agent trouble » en directrice de musée revêche ; dans une scène tordante du film choral de Pascal Thomas, « Les maris, les femmes, les amants », mère odieuse d’un dentiste amoureux, elle met au placard les vieux tourtereaux qui n’ont pas été sages !
Cultivant agréablement l’art d’être déplaisante, Héléna Manson n’en oublie pas pour autant la malice comme le prouve l’excellent « Marie-Martine » en 1942 : épouse de Jules Berry - qu’elle appelle « Papa » - elle se laisse traiter d’idiote et de charogne par ce mari peu reluisant mais n’hésite pas à le présenter à Bernard Blier sous un jour ridicule qui le fait enrager. On ne peut que regretter que cet humour manifeste ne soit pas apparu plus souvent, exception faite de deux contributions à l’univers fantaisiste de Carlo Rim : dans « Escalier de service » (1954), son époux est un autre redoutable cabot, Saturnin Fabre, dans le rôle d’un bourreau très rangé ; dans « Les truands » (1956), elle ne dépare pas la famille de malandrins dirigée par Yves Robert et Sylvie. Parmi les cinéastes d’importance qui l’ont dirigée, n’oublions pas Max Ophuls qui l’emploie à deux reprises. « Lola Montès » (1955) lui réserve son emploi classique de vieille célibataire mais dans l’adaptation de « La Maison Tellier », sketch central du « Plaisir » (1951), elle joue Marie Rivet, l’épouse de Gabin, celle qui accueille avec le sourire (mais oui !) les filles galantes qui débarquent dans sa ferme normande et saura fermer les yeux sur l’incartade amoureuse de son mari, trop sensible aux charmes de Danielle Darrieux…
A la télévision, Héléna Manson est apparue dans deux feuilletons populaires : dans les années 60, elle joue la belle-mère autoritaire (mais finalement sympathique) de « Sylvie des Trois Ormes » ; en 1972, on la retrouve dans une bonne adaptation de Gaston Leroux, « L’homme qui revient de loin », en vieille servante suspicieuse ; plusieurs plans nous la présentent, l’air sombre, au milieu d’animaux empaillés, dont sans doute un corbeau ! Clin d’œil à ses chers Pitoëff, on la revoit pour « Au théâtre ce soir » dans « Comme avant, mieux qu’avant » de Pirandello. Présente à cinq reprises au générique de la fameuse série « En votre âme et conscience », elle y tient avec brio la vedette en 1958 pour « L’affaire de Villemonble » réalisée par Claude Barma ; dès qu’elle apparaît, le spectateur n’a plus de doutes : Héléna alias Euphrasie Mercier est coupable, forcément coupable !
Jean-Paul Briant